Jef Aérosol. Parcours fléché

Aérosol Jef - Beauvallet Jean-Daniel - Buyse Alain

ALTERNATIVES

Jef Aérosol1967: l'été de l'amour en Californie, le mouvement hippie est en train de naître, j'ai 10 ans et je vis à Nantes, ma ville natale.Mon goût pour les photo-graphismes remonte à l'adolescence, nourrie d'imagerie pop, de culture et contre-culture rock, de musique et littérature anglo-saxonnes, de fantasmes californiens et rêves psychédéliques, de BD alternatives et de «comix» américains, de Pop Art, de pochettes de disques sacralisées et de rock-stars déifiées. Je me repais alors de tout ce que Londres, San Francisco et New-York offrent pour nourrir mon esprit de rébellion et ma soif d'un ailleurs fantasmé...Ainsi, mon musée imaginaire se remplit d'année en année, de disque en disque, d'affiche en affiche, de nouveau numéro de Rock & Folk en nouvel exemplaire de Best. Aux images s'ajoutent les mots, leur indispensable complément. Je bois comme du petit lait les proses habitées de Philippe Paringaux, Philippe Garnier, Yves Adrien, Patrick Eudeline, Paul et Marjorie Alessandrini...Ce sont les bouquins évoqués par les rock-critics que nous dévorons, casque stéréo sur les oreilles, Stooges ou Velvet Underground en résidence prolongée sur la platine tourne-disques: Kerouac, Ginsberg, Burroughs, Pélieu, Hedayat, Selby, Bukowski, etc. Beat Génération, Flower Power, Pop Révolution: derrière ce grand flou artistique, je perçois une terre promise, un jardin d'Éden... hélas inaccessibles pour un adolescent nantais timide et trop rêveur!Oui, je suis un enfant du rock, même si, en parallèle, j'ai toujours aimé, joué et écouté du folk et de la musique traditionnelle. D'ailleurs, dans les années 1970, le folk se farde tout autant que le rock et s'affuble des mêmes oripeaux aux couleurs post-hippies. Nombreux sont les exemples, de l'Incredible String Band à Donovan, de Steeleye Span à Malicorne...Et tout au long de ces années d'effervescence, je découpe, je colle, je peins, je bricole. Je crée des images directement inspirées de cette iconographie pop-rock-folk! Je fais aussi de nombreux dessins à la plume ou au crayon, plutôt minutieux et d'inspiration assez surréaliste.Mes parents m'offrent ma première guitare pendant des vacances en Andalousie, en 1969. À peine rentré à la maison, je remplace les cordes nylon par des cordes acier pour un son plus folk, et je m'écorche les doigts sur les accords de La Poupée qui fait non et Blowin'in the wind. Puis, c'est la naissance de mon premier groupe. Nous jouons du folk et enregistrons même un album, pour le moins artisanal! L'été, nous partons guitare sur le dos, en stop, vers les festivals qui fleurissent de la Bretagne aux Cévennes, en passant par l'Angleterre et l'Irlande.Vers la fin des années 1970, dans les rues de Nantes, je suis intrigué par un affichage sauvage de sérigraphies signées Clic Clac. Il s'agit d'images très graphiques et de textes poétiques. Je suis séduit par cette façon d'investir l'espace urbain en utilisant un médium «classique» (l'affiche) mais qui, cette fois-ci, ne «vend» rien. J'apprends plus tard qu'il s'agit d'une action menée par quelques étudiants aux Beaux-Arts.J'ai vingt ans quand le raz de marée punk secoue Londres et Paris, annoncé depuis quelque temps déjà par quelques New-Yorkais fédérés depuis 1973 autour du mythique club CBGB: Ramones, Télévision, Parti Smith, Suicide, New York Dolls. Quelque chose est en train de changer, dont le magazine Rock News se fait écho à Paris. Vu de Nantes, tout ça est bien flou, mais les choses se précipitent, Sex Pistols, Clash, Jam, Génération X, Buzzcocks, Saints, Stranglers, Damned... déboulent, et rien ne sera plus jamais comme avant! L'imagerie colorée et psychédélique aux fragrances san-franciscaines est soudain balayée par un chaos en noir et blanc, par des typos industrielles et photos anarchiquement empilées, compilées, déchirées, détournées. Lors de séjours réguliers en Angleterre, je m'immerge dans cette punkitude, sans pour autant délaisser les folk-clubs! Deux mondes radicalement opposés... À Paris émerge une nouvelle scène, drivée par Patrick Eudeline, Ricky Darling, Elli & Jacno, Vincent Palmer... Eudeline écrit L'Aventure punk, fanzines et graphzines se multiplient. Je me gave d'images: celles de Bazooka me font l'effet d'un électrochoc. Dans Un regard moderne (édité par Libé), ils pratiquent une révolution graphique absolue. Désacralisation et mélange: photocopie, papiers déchirés, dessins au crayon bic, collages, humour morbide, provocation...Les premiers pochoirs ayant capté mon attention sont probablement ceux dont Strummer, Jones et Simonon, du groupe Clash, décorent leurs fringues en 1977. Il s'agit surtout de lettrages, mais l'effet est nouveau et efficace. Les dégaines de ces mecs me fascinent mais, en 1977, je joue encore du folk et j'ai du mal à me couper les cheveux!(...)

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EAN
9782862277516
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