Louis Pasteur. Un aventurier de la science
UNE RACE DE TRAVAILLEURS
En ce début d'après-midi du 5 août 1815, une chaleur intense règne sur la vallée où s'étire la ville de Salins. Après avoir subi une première invasion lors de l'abdication de Napoléon Ier, la Cité du Sel a été réoccupée, à l'issue des Cent Jours, par une unité autrichienne qui y tient garnison depuis la seconde défaite de l'Empereur. A l'exception des réquisitions alimentaires et des dédommagements financiers qui leur sont imposés localement par les vainqueurs, les habitants n'ont pas eu, jusqu'ici, à souffrir d'exactions comme cela s'est produit en d'autres villes et villages de la région.
Quelques semaines seulement après sa démobilisation, Jean-Joseph Pasteur, sergent-major au 3e de ligne redevenu civil, a repris son travail à la tannerie artisanale dont son oncle Jean-Charles est propriétaire au hameau de Champtave. Il s'active depuis lors dans l'atelier de corroyage où il oeuvrait déjà avant son incorporation. Ce jour-là, absorbé par le maniement de la lourde «marguerite», outil servant à assouplir le cuir, il tourne le dos à l'entrée. C'est la raison pour laquelle il ne voit pas la silhouette du visiteur qui vient de s'encadrer dans le rectangle lumineux de la porte donnant sur la cour intérieure de la maison.
- C'est toi, Pasteur Jean-Joseph?
En entendant la voix rude qui vient de l'interpeller, l'ancien soldat interrompt son travail et se retourne. Dans le contre-jour, il découvre la carrure d'un homme trapu, moins grand que lui mais plus corpulent car il est lui-même très maigre. Avant de répondre, il prend le temps de s'éponger soigneusement le front à l'aide d'un mouchoir à carreaux qu'il retire de la poche de son pantalon. Cette attitude agace sans doute le visiteur car il fait un pas à l'intérieur de l'atelier et réitère sa question avec impatience:
- Pasteur Jean-Joseph, c'est toi?
- Oui.
- Je viens t'avertir que tu es convoqué demain matin à la mairie. Tu devras apporter toutes les armes de guerre que tu possèdes!
L'ouvrier tanneur comprend à cet instant à qui il a affaire. Il s'agit d'un sergent de ville. Il reconnaît son uniforme, son bicorne orné de la cocarde blanche, son baudrier, sa sabretache et sa plaque professionnelle. L'homme est dans la trentaine, replet, à la trogne rougeaude empreinte de suffisance.
- Par ordre de qui est cette convocation?
- De notre maire. Monsieur de Bancenel!
L'ancien sous-officier de l'armée napoléonienne demeure un instant silencieux avant de remarquer:
- Je croyais que les Autrichiens qui occupent Salins dispensaient les officiers de la Grande Armée et les titulaires de la croix de la Légion d'honneur de cette mesure? Je n'ai que le grade de sergent-major, mais j'ai été décoré de cette médaille sur le champ de bataille lors des combats de Bar-sur-Aube, le 11 mars 1814. Je peux le prouver!
- Notre maire se moque bien des décorations décernées par l'usurpateur! Je te conseille donc de venir demain matin à la mairie sans faire d'histoires, en apportant ton sabre, et éventuellement les autres armes en ta possession, ou sinon...
Sur cette menace implicite, le sergent de ville tourne les talons et retraverse la cour ensoleillée afin de rejoindre la rue. Jean-Joseph Pasteur le regarde s'éloigner durant un instant avant de reprendre son travail et se remettre à taper, avec une sorte de rage en forme d'exutoire de sa colère rentrée, sur la pièce de cuir qu'il est en train de corroyer.
En ce début d'après-midi du 5 août 1815, une chaleur intense règne sur la vallée où s'étire la ville de Salins. Après avoir subi une première invasion lors de l'abdication de Napoléon Ier, la Cité du Sel a été réoccupée, à l'issue des Cent Jours, par une unité autrichienne qui y tient garnison depuis la seconde défaite de l'Empereur. A l'exception des réquisitions alimentaires et des dédommagements financiers qui leur sont imposés localement par les vainqueurs, les habitants n'ont pas eu, jusqu'ici, à souffrir d'exactions comme cela s'est produit en d'autres villes et villages de la région.
Quelques semaines seulement après sa démobilisation, Jean-Joseph Pasteur, sergent-major au 3e de ligne redevenu civil, a repris son travail à la tannerie artisanale dont son oncle Jean-Charles est propriétaire au hameau de Champtave. Il s'active depuis lors dans l'atelier de corroyage où il oeuvrait déjà avant son incorporation. Ce jour-là, absorbé par le maniement de la lourde «marguerite», outil servant à assouplir le cuir, il tourne le dos à l'entrée. C'est la raison pour laquelle il ne voit pas la silhouette du visiteur qui vient de s'encadrer dans le rectangle lumineux de la porte donnant sur la cour intérieure de la maison.
- C'est toi, Pasteur Jean-Joseph?
En entendant la voix rude qui vient de l'interpeller, l'ancien soldat interrompt son travail et se retourne. Dans le contre-jour, il découvre la carrure d'un homme trapu, moins grand que lui mais plus corpulent car il est lui-même très maigre. Avant de répondre, il prend le temps de s'éponger soigneusement le front à l'aide d'un mouchoir à carreaux qu'il retire de la poche de son pantalon. Cette attitude agace sans doute le visiteur car il fait un pas à l'intérieur de l'atelier et réitère sa question avec impatience:
- Pasteur Jean-Joseph, c'est toi?
- Oui.
- Je viens t'avertir que tu es convoqué demain matin à la mairie. Tu devras apporter toutes les armes de guerre que tu possèdes!
L'ouvrier tanneur comprend à cet instant à qui il a affaire. Il s'agit d'un sergent de ville. Il reconnaît son uniforme, son bicorne orné de la cocarde blanche, son baudrier, sa sabretache et sa plaque professionnelle. L'homme est dans la trentaine, replet, à la trogne rougeaude empreinte de suffisance.
- Par ordre de qui est cette convocation?
- De notre maire. Monsieur de Bancenel!
L'ancien sous-officier de l'armée napoléonienne demeure un instant silencieux avant de remarquer:
- Je croyais que les Autrichiens qui occupent Salins dispensaient les officiers de la Grande Armée et les titulaires de la croix de la Légion d'honneur de cette mesure? Je n'ai que le grade de sergent-major, mais j'ai été décoré de cette médaille sur le champ de bataille lors des combats de Bar-sur-Aube, le 11 mars 1814. Je peux le prouver!
- Notre maire se moque bien des décorations décernées par l'usurpateur! Je te conseille donc de venir demain matin à la mairie sans faire d'histoires, en apportant ton sabre, et éventuellement les autres armes en ta possession, ou sinon...
Sur cette menace implicite, le sergent de ville tourne les talons et retraverse la cour ensoleillée afin de rejoindre la rue. Jean-Joseph Pasteur le regarde s'éloigner durant un instant avant de reprendre son travail et se remettre à taper, avec une sorte de rage en forme d'exutoire de sa colère rentrée, sur la pièce de cuir qu'il est en train de corroyer.
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EAN
9782268075402
Caractéristiques
EAN | 9782268075402 |
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Titre | Louis Pasteur. Un aventurier de la science |
Auteur | Besson André |
Editeur | DU ROCHER |
Largeur | 235mm |
Poids | 474gr |
Date de parution | 23/05/2013 |
Nombre de pages | 313 |
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