Le corps dans l'histoire et les histoires du corps (XVIIe-XVIIIe siècle). Travaux de jeunes chercheu

Bouffard Mickaël - Perras Jean-Alexandre - Wicky E

HERMANN

Extrait de l'introduction

Cet ouvrage tire son origine d'un colloque qui s'est tenu à l'Université de Montréal au mois de mars 2009 sous la présidence d'honneur de l'historien Georges Vigarello. Une soixantaine de jeunes chercheurs issus de différentes disciplines se sont réunis afin de réfléchir conjointement aux implications théoriques d'une histoire du corps sous l'Ancien Régime. Après avoir constaté la forte présence de ce champ dans les études sur les XVIIe et XVIIIe siècles, il semblait d'autant plus pertinent de placer le corps au centre des réflexions, afin de mesurer, d'un point de vue historiographique, les enjeux d'une perspective transversale qui dépasse non seulement les limites des disciplines, mais aussi celles de ce qui s'offre directement à la connaissance. En effet, envisager le corps constitue un défi pour les historiens qui ne peuvent y accéder que par le truchement, métonymique, d'objets qui ont entretenu avec lui un rapport de contiguïté ou de corrélation (vêtements, traités médicaux, manuels, pratiques et institutions, etc.).
Outre l'étude des différents modes d'appréhension et de représentation du corps, ce domaine de recherche nous a semblé être un espace privilégié qui permet de développer un dialogue entre jeunes chercheurs sur la pratique de l'histoire actuelle. En effet, l'étude historique des perceptions et des représentations du corps invite à démêler l'écheveau des relations nouées entre le corps et la société dans laquelle il s'inscrit. Mais elle est aussi propice au développement d'un double rapport d'intimité et d'étrangeté entre l'historien et la période qu'il étudie, puisque c'est souvent à l'aune de son propre corps, de ses propres sensibilités, qu'il peut mesurer les écarts creusés par l'histoire, et de là, constituer son objet d'étude. Par conséquent, l'histoire du corps, plus que n'importe quel champ de recherches, demande à l'historien de prendre conscience, afin de les mettre à distance, de ses préjugés et des conceptions qui le rattachent à son époque. C'est en ce sens que l'histoire du corps nous semble tout particulièrement inviter à une réflexion sur la nature anachronique de toute perspective historique.
Ainsi, la tenue de ce colloque était soumise à un double impératif: d'une part, celui d'instaurer un dialogue entre des chercheurs en histoire du corps, et d'autre part, celui d'introduire une dimension réflexive dans les discussions afin de mettre à jour les méthodologies sur lesquelles se fonde cette histoire. Les croisements de ces deux perspectives, historique et historiographique, amorcés par la formulation, en chiasme, du titre du colloque, Le corps dans l'histoire et les histoires du corps, ont permis de faire affleurer différentes tendances à l'oeuvre dans la pratique actuelle de l'histoire du corps. Ces grandes lignes nous ont semblé propres à établir un état des lieux de l'historiographie du corps, car elles se déclinaient dans les travaux de jeunes historiens issus de disciplines différentes.
La plupart des travaux présentés témoignait des efforts nécessaires à la saisie d'un objet aussi fuyant que le corps sous l'Ancien Régime, qui se concrétisaient notamment par la recherche de corpus originaux traités de façon à faire apparaître les préjugés et les présupposés qu'ils trahissent. Mais la tendance majeure qui nous est apparue consiste en l'élaboration systématique par les historiens de questionnements permettant d'étudier leur objet à travers un seuil, une limite. En effet, il semble que les jeunes historiens actuels structurent d'emblée la définition de leur objet d'étude par la détermination d'un seuil autour duquel ils concentrent leurs recherches. Ces seuils ou ces limites prennent des formes multiples. Il peut s'agir de seuils temporels, d'évolutions des sensibilités ou des perceptions, de la définition, et donc de la délimitation de notions qui s'inscrivent à la fois dans un réseau conceptuel et dans une période temporelle spécifiques, permettant d'en assurer la cohérence et la particularité. La pratique actuelle en histoire du corps ne semble envisager la relation entre les différents événements qu'en termes de discontinuité; les ruptures à l'oeuvre dans l'histoire ouvrent autant de brèches propices à penser les usages et les représentations, elles rendent possibles des comparaisons qui permettent de saisir les subtilités les plus ténues.

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EAN
9782705684518
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