Ecrits sur le théâtre

Brecht est l'auteur qui a voulu réconcilier le théâtre avec la modernité. Sa théorie d'une esthétique de la "distanciation" cherche à ouvrir la scène aux dimensions du monde moderne. Contre une esthétique naturaliste qui emprisonne le personnage dans un milieu et une psychologie donnés, contre une esthétique expressionniste qui, elle, donne trop de prééminence au sujet, Brecht prône une esthétique de la "distanciation" qui instaure un rapport dialectique entre la scène et la salle. Brecht invitait dans Mère Courage et L'Opéra de quat'sous, ces deux pièces les plus jouées, à créer un vrai rapport de liberté qui engage le spectateur face au spectacle, le comédien face à son rôle et, plus globalement, chaque individu face à la société. Théâtre réactif, éminemment politique, d'inspiration marxiste, le théâtre brechtien voulait réveiller et provoquer. Ses Écrits sur le théâtre conservent encore toute leur ferveur révolutionnaire quand Brecht lance aux partisans d'un théâtre classique et bourgeois que ce théâtre-là "se fait lentement bordel pour le contentement des putains'. Gros coup de pied dans la fourmilière du théâtre institutionnel, il n'y a pas pour Brecht de théâtre possible quand celui-ci est à la solde des gouvernants et quand il est le reflet de leur idéologie. Véritable petit manuel du metteur en scène dissident, ses Écrits sur le théâtre peuvent se brandir en signe de contestation comme Le Petit Livre rouge de Mao. Mais on découvre à la lecture qu'ils regorgent aussi de conseils judicieux sur l'art de la mise en scène et sur la direction de l'acteur."