La faute de Rose
Cadier Florence
THIERRY MAGNIER
J'aurais pu la tuer! Il suffisait de serrer un peu plus fort mes doigts autour de son cou de poulet fripé. Ses yeux ronds auraient gonflé, elle aurait suffoqué, happé le filet d'air, sans se débattre, ses jambes auraient pédalé en accompagnant son souffle, elle est si vieille, et moi, je l'aurais regardée payer de sa mort mes semaines de souffrances. Sur les murs, le Christ en Croix et la Vierge des tableaux auraient souri.
Au lieu de cela, j'ai dégagé mes doigts, je n'ai pas fait tout ce chemin pour devenir une tueuse.
Elle me regarde avec des yeux étonnés, comme si elle ne comprenait pas ce qui lui est arrivé. Sa cornette est de travers, le bandeau blanc cachant ses cheveux descend sur son front. Elle se lève péniblement, son âge grince dans ses articulations. Ma colère cogne encore dans mes veines, je tremble, je cache mes mains, je ne veux pas qu'elle s'amuse de mon état. Elle est sereine, elle devait savoir que je n'irais pas jusqu'au bout.
- Sais-tu ce que tu mérites? dit-elle d'une voix cassée par l'étranglement. Sais-tu que tu ne sortiras jamais? Tu m'entends, jamais! J'en fais la promesse!
- Chienne! Sorcière! je laisse échapper. Elle s'en fiche, elle fait comme si elle n'avait rien entendu. Elle agite la clochette en bronze, frénétiquement, sans même me regarder. Elle n'a pas peur de moi, ça se voit. Puis, elle s'assied dans un fauteuil en reprenant bruyamment son souffle. Soeur Kate et soeur Bridget entrent sans frapper. La cloche est un signal entre elles.
- Emmenez Rose dans la pièce du haut, ça la fera réfléchir!
Les deux nonnes me tiennent par le coude et me poussent dans le couloir glacial du grenier. Les cellules de punition sont ouvertes. J'entends soeur Kate marmonner, elle prend un air douloureux, elle désapprouve et récite un Notre Père, à mon intention et à celle de toutes les enfermées dans ce couvent. Elle n'aime pas les châtiments qu'on nous inflige, elle pense qu'ils ne sont jamais divins comme veulent nous le faire croire les autres. Un jour, je l'ai entendue le dire à soeur Bridget et elle s'est fait rabrouer. Elle me sourit, elle me plaint. Quel âge peut-elle avoir? Je l'imagine à peine plus âgée que moi. Ça se voit à ses boucles rousses rebelles qui s'échappent de sa coiffe et à ses yeux noisette, encore brillants de certitude. Elle est arrivée il y a peu, elle voulait être missionnaire, mais l'évêché a refusé de l'envoyer en Afrique car enfant, elle avait contracté la tuberculose.
Au lieu de cela, j'ai dégagé mes doigts, je n'ai pas fait tout ce chemin pour devenir une tueuse.
Elle me regarde avec des yeux étonnés, comme si elle ne comprenait pas ce qui lui est arrivé. Sa cornette est de travers, le bandeau blanc cachant ses cheveux descend sur son front. Elle se lève péniblement, son âge grince dans ses articulations. Ma colère cogne encore dans mes veines, je tremble, je cache mes mains, je ne veux pas qu'elle s'amuse de mon état. Elle est sereine, elle devait savoir que je n'irais pas jusqu'au bout.
- Sais-tu ce que tu mérites? dit-elle d'une voix cassée par l'étranglement. Sais-tu que tu ne sortiras jamais? Tu m'entends, jamais! J'en fais la promesse!
- Chienne! Sorcière! je laisse échapper. Elle s'en fiche, elle fait comme si elle n'avait rien entendu. Elle agite la clochette en bronze, frénétiquement, sans même me regarder. Elle n'a pas peur de moi, ça se voit. Puis, elle s'assied dans un fauteuil en reprenant bruyamment son souffle. Soeur Kate et soeur Bridget entrent sans frapper. La cloche est un signal entre elles.
- Emmenez Rose dans la pièce du haut, ça la fera réfléchir!
Les deux nonnes me tiennent par le coude et me poussent dans le couloir glacial du grenier. Les cellules de punition sont ouvertes. J'entends soeur Kate marmonner, elle prend un air douloureux, elle désapprouve et récite un Notre Père, à mon intention et à celle de toutes les enfermées dans ce couvent. Elle n'aime pas les châtiments qu'on nous inflige, elle pense qu'ils ne sont jamais divins comme veulent nous le faire croire les autres. Un jour, je l'ai entendue le dire à soeur Bridget et elle s'est fait rabrouer. Elle me sourit, elle me plaint. Quel âge peut-elle avoir? Je l'imagine à peine plus âgée que moi. Ça se voit à ses boucles rousses rebelles qui s'échappent de sa coiffe et à ses yeux noisette, encore brillants de certitude. Elle est arrivée il y a peu, elle voulait être missionnaire, mais l'évêché a refusé de l'envoyer en Afrique car enfant, elle avait contracté la tuberculose.
7,70 €
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EAN
9782364740716
Caractéristiques
EAN | 9782364740716 |
---|---|
Titre | La faute de Rose |
Auteur | Cadier Florence |
Editeur | THIERRY MAGNIER |
Largeur | 120mm |
Poids | 140gr |
Date de parution | 14/04/2012 |
Nombre de pages | 176 |
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