Cliniques méditerranéennes N° 83, 2011 : Penser notre époque : mutations du sujet ou solutions subje

Ducousso-Lacaze Alain - Grihom Marie-José

ERES

Michel Danti-JuanDroit pénal, changement social et économie psychique: difficultés du questionnement et plausibilité des rapprochementsL'intitulé de ma communication, j'en suis tout à fait conscient, est bien long et un peu alambiqué. Aussi me faut-il commencer par mettre à profit l'introduction de mon propos pour m'en expliquer, en en décomposant les différents aspects.Pour le droit pénal, il n'y a guère de difficulté à supposer de ne pas vouloir réduire les choses à une dimension strictement procédurale. Tel ne sera pas mon propos ici puisque je vais être amené à évoquer davantage le droit pénal de fond qui se nourrit plutôt d'incriminations et de sanctions que de règles du procès.Pour ce qui est du changement social, pas de difficulté non plus. Il s'agit des modifications qui affectent le corps social de façon significative et amènent à s'interroger aussi bien sur leurs causes que sur leurs effets. On perçoit tout de même immédiatement que c'est à travers les rapports qu'entretient le droit pénal avec le changement social que les choses seront ici envisagées et sans que l'on sache très bien encore, à ce stade, à quel titre est opéré ce rapprochement. Est-ce parce que le changement social entraînerait des modifications du droit pénal qui en deviendrait ainsi emblématique? Ou est-ce parce que, au contraire, les réformes pénales seraient susceptibles d'infléchir les comportements et de générer ainsi une certaine forme de changement social? Nous y reviendrons plus loin.Enfin, reste l'économie psychique, terme savant et obscur, mais dont j'ai fini par comprendre grâce aux explications et à l'indulgence de mes collègues psychologues, qu'il recouvre en quelque sorte des états d'esprit, des mentalités, la façon dont les uns et les autres ressentent les transformations sociales et le retentissement de ces dernières sur leur fonctionnement psychique.Dès lors, c'est sur une relation triangulaire qu'il faut s'interroger. En tant qu'elle est susceptible d'être en rapport de cause à effet avec le changement social, dans quelle mesure l'évolution du droit pénal permet-elle de nous renseigner sur la psychologie de nos contemporains?Mais je me demande au fond si le juriste que je suis est le mieux placé pour s'interroger de la sorte. J'imagine volontiers qu'en me sollicitant, les organisateurs de ce dossier auront pensé qu'au moins un juriste a quelques chances de connaître les lois. En principe, cela est vrai... Mais je ne suis pas certain pour autant que ce choix soit le plus judicieux. D'abord parce que les juristes sont souvent pleins d'illusions sur l'effet attendu des lois qu'ils étudient et je les crois pour cette raison souvent empreints d'un certain idéalisme législatif dont, pour être conscient, je ne m'estime pas pour autant indemne. Ensuite, parce que les sociologues et les psychologues sont sans doute plus éclairés et me paraissent bien mieux armés que les juristes pour formuler les hypothèses - car en vérité il ne peut guère s'agir que de cela -sur les états d'âme de leurs contemporains.Quoi qu'il en soit, m'étant engagé à m'interroger sur ce thème et n'ayant aucunement l'intention de choisir la désertion, je me suis mis au travail et me dispose à vous livrer aujourd'hui le fruit de mes réflexions. Toutefois, comme je n'ai pas plus de penchant pour le charlatanisme, j'entends bien prendre toutes les précautions qui s'imposent de sorte qu'avant d'évoquer les rapprochements qui paraissent les plus plausibles entre l'évolution du droit pénal et les dispositions d'esprit de nos concitoyens (II), j'entends bien attirer l'attention sur les difficultés inhérentes à une telle interrogation (I).

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EAN
9782749214139
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