Descartes et l'ordre politique. Critique cartésienne des fondements de la politique
Guenancia Pierre
GALLIMARD
Résumé :
À l?effondrement des régimes communistes a succédé le pullulement des nationalismes ethniques et religieux. Des uns aux autres les discours et les symboles ont changé, mais pas l?idée que les hommes, c?est-à-dire des individus, sont d?abord les membres d?un tout (État, parti, nation, ethnie, peuple, communauté religieuse). À ce défi idéologique, il n?est qu?une seule réponse à opposer : un individu n?appartient à personne.
Les déterminations qu?il reçoit de l?extérieur (sa race, sa nation, sa religion), pour importantes qu?elles soient, ne tracent pas un cadre dans lequel il doit nécessairement s?inscrire. À tous revient la liberté primordiale de s?inclure dans une communauté ou dans un tout, ou de s?en séparer. C?est le grand enseignement de la critique de l?ordre politique à laquelle se livra Descartes. Critique en apparence paradoxale : si Descartes n?a écrit aucun traité de politique, c?est dans les textes touchant à la morale que se trouvent les deux principaux points d?appui pour résister au politique.
C?est d?abord la critique des faux dévots, bigots et superstitieux, qui " sous ombre qu?ils vont souvent à l?église, qu?ils récitent forces prières, qu?ils portent les cheveux courts, qu?ils jeûnent, qu?ils donnent l?aumône, pensent être entièrement parfaits, et s?imaginent qu?ils sont si grands amis de Dieu qu?ils ne sauraient rien faire qui lui déplaise, et que tout ce que leur dicte leur passion est un bon zèle, bien qu?elle leur dicte quelquefois les plus grands crimes qui puissent être commis par des hommes, comme de trahir des villes, de tuer des princes, d?exterminer des peuples entiers, pour cela seul qu?ils ne suivent pas leurs opinions ".
De ces lignes, plus actuelles que jamais, qui font du mélange de la politique et de la religion l?essence de la terreur, il résulte que toute conception du monde qui repose sur, ou qui implique une division entre deux catégories d?hommes (fidèles/infidèles ; amis/ennemis ; citoyens/étrangers) est génératrice de violence et de guerre. Les crimes les plus odieux et les plus fréquents dans l?histoire sont inspirés, commandés, justifiés par la politique.
C?est ensuite l?idée qu?un individu peut, quelquefois, valoir plus que le collectif et que c?est à lui de le déterminer : " Et il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie, à ceux de sa personne en particulier ; toutefois avec mesure et discrétion, car on aurait tort de s?exposer à un grand mal, pour procurer seulement un petit bien à ses parents ou à son pays ; et si un homme vaut plus, lui seul, que tout le reste de sa ville, il n?aurait pas raison de se vouloir perdre pour la sauver ".
Ces deux points sur lesquels on peut édifier une politique cartésienne ne sont pas séparables : la politique, trop liée à la contingence, aux individus, aux époques, ne peut être une science et aucune de ses propositions ne peut être appliquée invariablement ? la sagesse et la raison consistant à savoir juger selon les cas.
C?est le jugement de chacun et non la règle, la consigne, le commandement, qui remplit l?office de la raison dans le domaine des choses humaines, des actions et des événements. Cette restitution de la pensée cartésienne, confrontée à celles de Pascal, de Hobbes, de Spinoza ou de Rousseau, ne vise pas à construire une théorie politique là où il n?y en a pas, mais à dégager la sortie de la logique qui fait de l?individu un simple élément du corps politique.
Cela pourrait s?appeler l?actualité de Descartes.
À l?effondrement des régimes communistes a succédé le pullulement des nationalismes ethniques et religieux. Des uns aux autres les discours et les symboles ont changé, mais pas l?idée que les hommes, c?est-à-dire des individus, sont d?abord les membres d?un tout (État, parti, nation, ethnie, peuple, communauté religieuse). À ce défi idéologique, il n?est qu?une seule réponse à opposer : un individu n?appartient à personne.
Les déterminations qu?il reçoit de l?extérieur (sa race, sa nation, sa religion), pour importantes qu?elles soient, ne tracent pas un cadre dans lequel il doit nécessairement s?inscrire. À tous revient la liberté primordiale de s?inclure dans une communauté ou dans un tout, ou de s?en séparer. C?est le grand enseignement de la critique de l?ordre politique à laquelle se livra Descartes. Critique en apparence paradoxale : si Descartes n?a écrit aucun traité de politique, c?est dans les textes touchant à la morale que se trouvent les deux principaux points d?appui pour résister au politique.
C?est d?abord la critique des faux dévots, bigots et superstitieux, qui " sous ombre qu?ils vont souvent à l?église, qu?ils récitent forces prières, qu?ils portent les cheveux courts, qu?ils jeûnent, qu?ils donnent l?aumône, pensent être entièrement parfaits, et s?imaginent qu?ils sont si grands amis de Dieu qu?ils ne sauraient rien faire qui lui déplaise, et que tout ce que leur dicte leur passion est un bon zèle, bien qu?elle leur dicte quelquefois les plus grands crimes qui puissent être commis par des hommes, comme de trahir des villes, de tuer des princes, d?exterminer des peuples entiers, pour cela seul qu?ils ne suivent pas leurs opinions ".
De ces lignes, plus actuelles que jamais, qui font du mélange de la politique et de la religion l?essence de la terreur, il résulte que toute conception du monde qui repose sur, ou qui implique une division entre deux catégories d?hommes (fidèles/infidèles ; amis/ennemis ; citoyens/étrangers) est génératrice de violence et de guerre. Les crimes les plus odieux et les plus fréquents dans l?histoire sont inspirés, commandés, justifiés par la politique.
C?est ensuite l?idée qu?un individu peut, quelquefois, valoir plus que le collectif et que c?est à lui de le déterminer : " Et il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie, à ceux de sa personne en particulier ; toutefois avec mesure et discrétion, car on aurait tort de s?exposer à un grand mal, pour procurer seulement un petit bien à ses parents ou à son pays ; et si un homme vaut plus, lui seul, que tout le reste de sa ville, il n?aurait pas raison de se vouloir perdre pour la sauver ".
Ces deux points sur lesquels on peut édifier une politique cartésienne ne sont pas séparables : la politique, trop liée à la contingence, aux individus, aux époques, ne peut être une science et aucune de ses propositions ne peut être appliquée invariablement ? la sagesse et la raison consistant à savoir juger selon les cas.
C?est le jugement de chacun et non la règle, la consigne, le commandement, qui remplit l?office de la raison dans le domaine des choses humaines, des actions et des événements. Cette restitution de la pensée cartésienne, confrontée à celles de Pascal, de Hobbes, de Spinoza ou de Rousseau, ne vise pas à construire une théorie politique là où il n?y en a pas, mais à dégager la sortie de la logique qui fait de l?individu un simple élément du corps politique.
Cela pourrait s?appeler l?actualité de Descartes.
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EAN
9782070131556
Caractéristiques
EAN | 9782070131556 |
---|---|
Titre | Descartes et l'ordre politique. Critique cartésienne des fondements de la politique |
Auteur | Guenancia Pierre |
Editeur | GALLIMARD |
Largeur | 128mm |
Poids | 397gr |
Date de parution | 13/09/2012 |
Nombre de pages | 400 |
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