Devenir vieux. Les enjeux de la psychiatrie du sujet âgé

Hanon Cécile

DOIN EDITEURS

Histoire d'une illusion Jean-Charles Pascal Les progrès de la médecine sont considérables mais ne sont pas équitablement répartis entre les différentes disciplines. Au-delà de son aspect économique, d'ailleurs très préoccupant, présenté tout d'abord comme le fameux «cinquième risque», dissimulé depuis sous la forme de la «solidarité pour l'autonomie», la presse néglige la question humaine et éthique de la dépendance liée au grand âge. On dit peu de chose sur le calvaire fréquemment lié au grand âge («la vieillesse est un naufrage», aurait dit Charles de Gaulle) avec sa multiplication de handicaps physiques, sensoriels, neuropsychiques et ses souffrances. Beaucoup d'articles, par contre, sont consacrés aux objectifs de vie à 120 ans, où aux quelques grands âgés qui jouent encore au bridge, conduisent un orchestre ou font du vélo, masquant ainsi les dures réalités auxquelles est confrontée la très grande majorité des autres, ceux qui sont considérés comme étant, doux euphémisme, en perte d'autonomie... Par une sorte d'étrange mimétisme, cette politique du non-dit se retrouve dans l'espace soignant et il a fallu la terrible canicule de 2003 pour mettre à jour la situation dramatique souvent liée au quatrième âge. La qualité de vie des grands âgés est majoritairement médiocre, mais il est difficile d'obtenir des données stables sur l'impact des différentes infirmités qui accompagnent la vieillesse. On ne dispose d'ailleurs pas de données chiffrées autres que celles des bénéficiaires de l'APA (allocation personnalisée d'autonomie) qui étaient 1 230 000 en 2008 et devraient être 1 600 000 en 2040. Le fait que 90 % des personnes de plus de 80 ans vivent encore chez elles ne permet pas de conclure qu'elles jouissent encore d'une autonomie satisfaisante. Vivre le plus longtemps possible en disposant de ses capacités intellectuelles, et de l'essentiel de ses capacités physiques, est un objectif essentiel et qui doit être au coeur des préoccupations de santé publique, mais est-ce encore vivre quand la conscience d'être soi a disparu? Il y a peu de situations où la distance entre le représenté et la réalité soit telle qu'on puisse évoquer une quasi-falsification. L'ouvrage de Régis Debray, Le Plan vermeil, traite de cette question dans un espace délicieusement provocateur, ironique et pessimiste. L'auteur y brise le consensus doucereux qui règne autour de la grande vieillesse, en proposant des solutions aussi déraisonnables que la création d'un «Bioland», véritable réserve choisie pour sa capacité climatique et géographique à abréger les vieillesses douloureuses et interminables. Il est évident que le sujet est scandaleux et qu'il contrarie fort les tenants du «vivre à tout prix» ou le lobby des maisons de santé médicalisées. Rares sont ceux qui, comme Régis Debray ou la psychanalyste Claude Maillard, brisent les artifices des docteurs Faust pour nous conduire sur le chemin d'une dure mais incontournable réalité.

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EAN
9782704013142
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