Un chercheur en campagne
Kahn Axel - Brousse Foster Mary
STOCK
Extrait de l'introduction
L'annonce
Dans l'Évangile selon saint Luc, l'ange Gabriel fut envoyé à Marie pour lui annoncer qu'elle porterait le fils de Dieu.
Dans mon cas, l'annonce prit la forme, de manière plus prosaïque, d'un appel téléphonique de Bertrand Delanoë, maire de Paris, qui serait très étonné sans doute d'être rapproché de l'ange Gabriel.
J'étais alors président de l'université Paris-Descartes depuis le 19 décembre 2007 et m'apprêtais, en cette matinée de novembre 2011, à terminer dans les meilleures conditions mon mandat. Quoique la législation me donnât la possibilité de le renouveler jusqu'au 31 août 2013, j'avais pris la décision de ne pas être candidat à ma propre succession. Je m'étais efforcé de susciter une candidature qui m'apparaissait souhaitable pour l'avenir de cette université à laquelle j'étais et demeure profondément attaché. Après une campagne épique, le successeur potentiel qui avait mes préférences fut élu. Je recevais ce matin-là un visiteur du monde académique dans le superbe bureau présidentiel où je venais de passer quatre années, récompensé de mes efforts par les prodigieux tableaux accrochés aux murs de cette très vaste pièce (en particulier un Joos van Cleve, peintre flamand du XVe siècle et le fameux tableau de Girodet représentant Hippocrate et son refus des présents que lui offre Artaxercès, le roi des Perses). Je réglais les derniers détails de la prochaine succession prévue le 20 décembre lorsque mon téléphone portable sonna.
«Axel, j'ai une idée singulière dont je désire vous faire part, me dit Bertrand Delanoë. Vous pouvez naturellement réagir comme vous l'entendez. Connaissez-vous la deuxième circonscription de Paris?» Je la connaissais en effet de façon vague car la presse se faisait l'écho de la déclaration de candidature de François Fillon et des protestations indignées de la maire du 7e arrondissement, Rachida Dati. Après que j'ai signalé mon faible degré d'informations à Bertrand Delanoë, ce dernier poursuivit: «Il nous apparaît qu'il faut opposer au futur ex-Premier ministre un candidat de poids, un candidat de la société civile susceptible de rendre cette compétition électorale symbolique. Et nous avons pensé à vous; votre position universitaire, vos travaux de chercheur, votre présidence d'une grande université de la circonscription et votre combat pour les valeurs vous confèrent toute la légitimité nécessaire. Face à François Fillon, votre candidature serait emblématique de l'esprit et des projets de la gauche.» Ce que ne me disait pas Bertrand Delanoë mais dont je prendrais bien vite conscience, était que la candidature de François Fillon imposait de lui opposer une «pointure». Cependant, les «pointures socialistes» montraient peu d'empressement à se porter candidats dans une circonscription dessinée pour la droite. D'où l'appel à un acteur de la société civile censé ressentir avec moins de douleur un échec annoncé.
Ma première réaction à l'invite du maire fut peu enthousiaste, pour tout dire négative. «De fait, cher Bertrand, votre proposition est originale. À dire vrai, j'ai d'autres projets. De plus, elle me semble ingagnable, cette circonscription! J'ai aujourd'hui soixante-sept ans et n'ai pas connu beaucoup d'échecs durant ma carrière. Le défi que vous me demandez de relever ne peut mener qu'à la défaite et je suis peu tenté à m'engager dans ce combat perdu d'avance.» Bertrand Delanoë n'insista pas. J'ai su qu'il s'était adressé ensuite à Robert Nadal, ancien procureur général de la République, qui avait lui aussi décliné l'offre.
L'annonce
Dans l'Évangile selon saint Luc, l'ange Gabriel fut envoyé à Marie pour lui annoncer qu'elle porterait le fils de Dieu.
Dans mon cas, l'annonce prit la forme, de manière plus prosaïque, d'un appel téléphonique de Bertrand Delanoë, maire de Paris, qui serait très étonné sans doute d'être rapproché de l'ange Gabriel.
J'étais alors président de l'université Paris-Descartes depuis le 19 décembre 2007 et m'apprêtais, en cette matinée de novembre 2011, à terminer dans les meilleures conditions mon mandat. Quoique la législation me donnât la possibilité de le renouveler jusqu'au 31 août 2013, j'avais pris la décision de ne pas être candidat à ma propre succession. Je m'étais efforcé de susciter une candidature qui m'apparaissait souhaitable pour l'avenir de cette université à laquelle j'étais et demeure profondément attaché. Après une campagne épique, le successeur potentiel qui avait mes préférences fut élu. Je recevais ce matin-là un visiteur du monde académique dans le superbe bureau présidentiel où je venais de passer quatre années, récompensé de mes efforts par les prodigieux tableaux accrochés aux murs de cette très vaste pièce (en particulier un Joos van Cleve, peintre flamand du XVe siècle et le fameux tableau de Girodet représentant Hippocrate et son refus des présents que lui offre Artaxercès, le roi des Perses). Je réglais les derniers détails de la prochaine succession prévue le 20 décembre lorsque mon téléphone portable sonna.
«Axel, j'ai une idée singulière dont je désire vous faire part, me dit Bertrand Delanoë. Vous pouvez naturellement réagir comme vous l'entendez. Connaissez-vous la deuxième circonscription de Paris?» Je la connaissais en effet de façon vague car la presse se faisait l'écho de la déclaration de candidature de François Fillon et des protestations indignées de la maire du 7e arrondissement, Rachida Dati. Après que j'ai signalé mon faible degré d'informations à Bertrand Delanoë, ce dernier poursuivit: «Il nous apparaît qu'il faut opposer au futur ex-Premier ministre un candidat de poids, un candidat de la société civile susceptible de rendre cette compétition électorale symbolique. Et nous avons pensé à vous; votre position universitaire, vos travaux de chercheur, votre présidence d'une grande université de la circonscription et votre combat pour les valeurs vous confèrent toute la légitimité nécessaire. Face à François Fillon, votre candidature serait emblématique de l'esprit et des projets de la gauche.» Ce que ne me disait pas Bertrand Delanoë mais dont je prendrais bien vite conscience, était que la candidature de François Fillon imposait de lui opposer une «pointure». Cependant, les «pointures socialistes» montraient peu d'empressement à se porter candidats dans une circonscription dessinée pour la droite. D'où l'appel à un acteur de la société civile censé ressentir avec moins de douleur un échec annoncé.
Ma première réaction à l'invite du maire fut peu enthousiaste, pour tout dire négative. «De fait, cher Bertrand, votre proposition est originale. À dire vrai, j'ai d'autres projets. De plus, elle me semble ingagnable, cette circonscription! J'ai aujourd'hui soixante-sept ans et n'ai pas connu beaucoup d'échecs durant ma carrière. Le défi que vous me demandez de relever ne peut mener qu'à la défaite et je suis peu tenté à m'engager dans ce combat perdu d'avance.» Bertrand Delanoë n'insista pas. J'ai su qu'il s'était adressé ensuite à Robert Nadal, ancien procureur général de la République, qui avait lui aussi décliné l'offre.
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Disponible sur commande
EAN
9782234074743
Caractéristiques
EAN | 9782234074743 |
---|---|
Titre | Un chercheur en campagne |
Auteur | Kahn Axel - Brousse Foster Mary |
Editeur | STOCK |
Largeur | 135mm |
Poids | 318gr |
Date de parution | 14/11/2012 |
Nombre de pages | 254 |
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