La religion selon Hobbes. Lecture du Léviathan III et IV et du De Cive III

Hobbes, philosophe anglais du XVIIe siècle, contemporain de Descartes, Pascal et Spinoza, est surtout connu pour sa philosophie politique et sa théorie du contrat social. L'état de nature étant un état de guerre de chacun contre chacun, un inter-individualisme conflictuel, chacun comprend qu'il est plus sage de renoncer à ses droits individuels en les confiant à une seule instance, le Prince, à condition que tous fassent de même et simultanément. C'est donc le Prince qui concentre les pouvoirs et assure l'ordre et la sécurité. Mais se pose alors, en régime chrétien, la question du rapport entre la souveraineté politique et le pouvoir religieux. Comment articuler le royaume civil et le Royaume de Dieu ? Quel pouvoir revient au clergé et qui le contrôle ? Quelle est l'autorité de l'Ecriture sainte et qui a le droit de l'interpréter ? Le salut se réduit-il à la paix civile, à la prospérité et à la sécurité ? Quel doit être le statut de l'Eglise ? Où et quand se situe le Royaume des cieux et comment y entrer ? Ce sont ces questions, décisives en régime chrétien, mais problématiques dès lors que l'on refuse toute division de la souveraineté, que Hobbes traite dans les dernières parties du Citoyen et du Léviathan. Or les commentateurs négligent souvent ces textes qui leur paraissent secondaires, archaïques, désuets, au profit des analyses politiques qui suscitent aujourd'hui encore bien des débats. Cette perspective est discutable, non seulement parce qu'elle est partielle mais parce que ces questions, nées au sein du christianisme, reparaissent aujourd'hui dans d'autres courants religieux, par exemple dans les courants islamistes qui veulent faire de la loi religieuse, la charia, la loi civile. L'ouvrage que nous proposons et qui reprend un cours de master-agrégation pour les étudiants de philosophie entend donc combler ce manque, présenter et élucider la philosophie religieuse de Hobbes, proposer une traduction du chapitre XIV du De homine qui porte sur la religion, exposer certaines critiques et montrer comment l'affirmation du caractère indivisible de la souveraineté a conduit à passer du magistère spirituel à l'obéissance à la loi civile, confortée et nourrie par une médecine de l'âme.