Toi aussi mon fils !

Extrait

Le retour - Vite Khio ! Ils arrivent ! me suis-je écrié. Nous courions à perdre haleine, nos corps courbés en deux. Je tenais fermement la main de Khiomara, ma soeur de onze ans et de trois ma cadette. Elle éprouvait les plus grandes peines à me suivre. - Je... Je n'en peux plus Divi, m'a-t-elle murmuré sur un ton suppliant. Elle était rouge et à bout de souffle. J'ai compris que si nous continuions à ce rythme, elle ne pourrait pas me suivre bien longtemps. Elle s'est appuyée contre la cloison en torchis de la hutte devant laquelle nous avions fait halte. Son petit corps frêle tremblait de fatigue ; ses cheveux épais et châtains commençaient à être trempés de sueur. Puis, elle a tourné ses grands yeux verts et brillants dans ma direction. - Tu... Tu n'aurais peut-être pas dû lancer... cette coupe de peinture rouge au visage de Cotos, a-t-elle réussi à dire entre deux respirations. - Il a traité Papa de «sale porc à la solde des Romains», ai-je répondu, également hors d'haleine. Ce museau de blaireau avarié a eu ce qu'il méritait ! - Oui, c'est vrai. N'empêche que maintenant, il veut nous faire la peau avec ses affreux cop... Khiomara a été interrompue par un épouvantable cri suraigu qui nous a déchiré les tympans. C'était un adolescent de mon âge, grand et gras, aux cheveux blonds et vêtu d'une tunique marron qui hurlait : «JE LES AI TROUVÉS ! ILS SONT LÀ !» C'était Cotos ! Sans attendre l'arrivée du reste de la troupe, nous sommes repartis de plus belle. Après avoir sillonné plusieurs ruelles, nous sommes tombés sur la grande place publique de la cité. C'était l'heure du marché : tout le monde se rendait dans les échoppes situées dans les halles en bois. C'étaient quatre gros bâtiments disposés à angle droit autour d'une petite place carrée. La chaussée était à cet instant foulée par de nombreuses personnes en quête d'une arme, d'une poterie ou d'un bijou. Forgerons, bronziers, émailleurs ou encore tabletiers braillaient de tous côtés pour vanter les mérites de leurs produits. On ne s'entendait plus : c'était à qui gagnerait les faveurs du plus grand nombre de clients. Les négociants de vin se trouvaient dans la halle du nord. Nous avons suivi cette direction avec Khiomara en nous faufilant entre les gens. Cotos suivi de ses deux acolytes, Bellovèse et Brennio, tentaient tant bien que mal de se frayer aussi un chemin dans la foule. Mais ils étaient plus rapides que nous ! J'ai accéléré l'allure tout en tirant toujours Khiomara. Pour l'instant, la peur lui avait fait oublier sa fatigue. Cependant, je savais qu'elle ne tiendrait pas longtemps. Notre course a été ralentie par la foule massée devant l'entrée de la halle aux vins. J'ai de nouveau nerveusement fouillé du regard nos arrières : Cotos n'était plus qu'à quelques pas. J'apercevais désormais très bien son visage joufflu parsemé de taches de peinture rouge et déformé par la colère.